![]() |
![]() |
![]() |
|||
![]() |
![]() |
![]() |
|||
![]() |
Ce numéro est le 99e d’ Imagine magazine. Le moment idéal pour « penser à neuf ». Nous lançons donc, avec ce 99e édito, un processus de rénovation de notre projet. La toute première étape : se mettre à votre écoute, amie lectrice, ami lecteur. Entendre et engranger vos bonnes idées, suggestions et autres propositions d’améliorations. L’année prochaine, lorsque ce travail de réflexion aura abouti, un Imagine rénové sortira de presse. Il portera les fruits de vos apports. Soyez partie prenante de ce réseau que nous souhaitons créer ! Imagine à neuf, c’est d’abord vous !
« Nous voulons
contribuer à
rendre crédible
et désirable un
autre projet
de société, nous voulons “Imaginer le
monde allant vert”. Parce que nous
croyons que c’est urgent et nécessaire.
Et que l’on ne sort d’une impasse qu’en
changeant radicalement de direction. »
C’étaient là, en 1996, les trois dernières
phrases du tout premier édito du magazine,
publié sous ce « drôle de titre »
encore cher à beaucoup de lecteurs :
Imagine le monde allant vert.
Reflétant l’esprit qui avait présidé à la
fondation du magazine, ce texte parlait
bien évidemment de la découverte alors
récente de la notion de « monde fini ».
Nous n’avons pas de planète Terre de
rechange ! Une réalité contre laquelle,
aujourd’hui encore, vient buter cette
obsession de la « croissance », une
chimère inventée par les économistes
néolibéraux, inculquée quotidiennement
comme une évidence à de trop larges
franges de la population.
Seconde idée fondatrice, portée par
Imagine dès sa création : la valeur de
« responsabilité » de l’Homme par
rapport aux autres espèces vivantes,
aux autres êtres humains qu’ils soient
d’ici ou d’ailleurs, et aux générations
futures. Avec cette phrase du philosophe
François Ost mise en exergue : « Pour
être pleinement autonome – ce qui est le
propre de l’être humain – l’homme doit
s’inscrire dans un projet qui le précède
(dans l’histoire) et qui le dépasse (dans
l’avenir). Et, privé d’humanité, l’homme
n’est rien. » [1]
Troisième élément fondateur et non des
moindres : l’identification d’une fraction
évaluée à l’époque à 22 % des Belges
francophones, qualifiés d’« altruistes
progressistes » [2]. Une partie significative de la population, susceptible
d’ouvrir la voie vers d’autres valeurs
que le matérialisme marchand, qui pèse
aujourd’hui beaucoup trop lourd sur le
destin du monde.
Que nos vies aient un sens
Cette sorte d’avant-garde d’une autre
société a depuis lors été analysée au cours
d’enquêtes approfondies menées aux
Etats-Unis (34,9 % de la population adulte
en 2008), en France et cette année en
Belgique. Nous dressons, dans ce numéro
du magazine, un intéressant « portrait de
ces porteurs de changement » [3].
On sait que deux grands groupes en font
partie : d’un côté la branche des « militants » plus ou moins actifs et soutenant
des associations comme Greenpeace, Inter
Environnement Wallonie, Les Amis de
la Terre… ou le parti Ecolo. Ceux-là sont
majoritairement des hommes et ils veulent
surtout « changer le monde ». L’autre
branche est pour sa part plutôt composée
de personnes avant tout intéressées par
ce que l’on appelle le « développement
personnel ». Ce sont majoritairement des
femmes, qui veulent d’abord « se changer
soi » et cherchent les chemins pour vivre le
plus heureux possible dans la société qui
est la nôtre.
Nous en avons d’ores et déjà l’intime
conviction : l’un des défis d’Imagine rénové
sera, autant que possible, de faire se
rencontrer et dialoguer ces deux branches
d’un même mouvement qui, aujourd’hui,
le plus souvent s’ignorent.
« A chaque époque son défi, nous explique
dans un entretien le philosophe Michel
Lacroix [4]. On vient de vivre des années
confortables, maintenant les problèmes
s’accumulent devant nous. Quelles sont les
sources de l’inquiétude contemporaine ?
L’idée que le progrès est en panne, la
persistance des crises économiques et
financières, la montée des fanatismes
religieux, l’absence de sens de nos vies,
notre compulsion à consommer qui est
une fuite en avant. Je suis convaincu que,
dans les années à venir, il apparaîtra
avec évidence que le seul progrès qui
nous est accessible, c’est la réalisation de
l’humanité que chacun porte en soi. » Et
le philosophe de poursuivre : « Jamais
jusqu’ici l’homme n’a pensé que l’évolution
de nos sociétés conduirait les jeunes à
affronter de grandes difficultés. A ce
pessimisme s’ajoutent aussi les menaces
qui pèsent sur les écosystèmes, l’idée que
l’habitabilité même de notre planète est
remise en question du fait de l’industrie
et de la technoscience. Dans ce contexte,
la réalisation de soi apparaît comme un
recours, comme un socle, un espoir auquel
se raccrocher. On peut exprimer les choses
ainsi : “Je suis moins confiant dans la
globalité du monde et sa marche en avant,
en revanche je vais me mettre à l’écoute de
mes propres aspirations et tirer le maximum
de mon existence, pour moi et pour
mes proches.” La réalisation de soi permet
d’aller à contre-courant d’un monde qui
apparaît de plus en plus difficile à vivre,
en faisant en sorte que nos vies aient un
sens. »
L’information, partie intégrante d’une économie locale vivante
Le sujet qui fait la couverture de ce
numéro du magazine constitue à l’évidence
le cadre dans lequel s’inscrit de plus
en plus Imagine sur le terrain de l’action
sociale concrète : faire partie intégrante de
la concrétisation d’un nouveau rêve. Avec
la création d’un système alimentaire local,
la construction-rénovation de logements
écologiques, le développement de sources
d’énergies renouvelables, mais aussi de
transports, de commerces, de méthodes
d’enseignement, d’un système de santé,
d’une sécurité sociale, d’une culture
créative – la presse alternative constitue
en effet l’une des pièces majeures de ce
puzzle que l’on appelle « l’économie locale
vivante » à (re)construire.
A nos yeux, un magazine contemporain
qui joue pleinement son rôle doit non
seulement savoir poser les bonnes questions,
être à l’écoute des inquiétudes et
des enthousiasmes de son époque, mais
il doit aussi se faire le reflet d’expériences
constructives, créatives, qui contribueront
à nous faire emprunter, individuellement
et collectivement, des chemins novateurs.
Un magazine comme nous le concevons
doit non seulement faire de la critique
sociale, mais il doit aussi proposer des
idées et des solutions concrètes, aider ses
lecteurs à passer à l’action, à titre personnel
ou en réseaux.
Beaucoup d’entre nous ont profondément
envie que le monde change, mais se sentent
frustrés de ne pouvoir suffisamment
agir concrètement. L’ambition d’Imagine
est d’être non seulement une boîte à idées
pour aujourd’hui et pour demain, faite de
créativité, de rigueur et d’engagement,
mais aussi un lieu de reconnaissance
où ces alternatifs créatifs se retrouvent,
un relais médiatique optimiste de leurs
réflexions, initiatives et actions.
Vous êtes les maillons d’un réseau !
Lancé grâce à l’aide financière d’Ecolo il
y a 17 ans déjà, mais devenu entièrement
indépendant de tout groupe de presse
ou parti politique depuis plus de 10 ans,
Imagine s’est construit sur la base d’une
ligne rédactionnelle originale et qui repose
sur un solide trépied : « Ecologie – Nord-Sud – Société ». Depuis 2005, ce projet est
renforcé par un partenariat avec le Centre
national de coopération au développement
(CNCD-Opération 11.11.11), qui assure
l’édition du supplément Demain le monde,
encarté dans Imagine et qui est spécifiquement consacré au développement.
Depuis ce mois d’août, Imagine a étoffé
son équipe rédactionnelle en engageant,
comme rédacteur en chef adjoint, Hugues
Dorzée, en provenance du quotidien
Le Soir où il a travaillé pendant 17 ans.
Des bases solides existent aujourd’hui
pour entreprendre une nouvelle étape
du développement de ce projet de presse
modeste mais au caractère affirmé.
En ces temps d’empires médiatiques de
plus en plus largement aux mains de
financiers et de grands groupes de l’armement,
du béton ou de l’industrie du luxe,
dont le seul but est de vendre de l’illusion
et du papier, mais qui disposent de
véritables machines de guerre idéologique
pour convaincre l’opinion que le modèle
néolibéral est en définitive le seul valable
– le fameux « There is no alternative » de
Mrs Thatcher quotidiennement seriné –, un
magazine comme le nôtre, généreux dans
son engagement, a un vrai rôle social et
culturel à jouer. Pour donner une place à la
créativité et à l’imagination, à la liberté de
style et de ton, à l’exigence et à la rigueur.
Et contribuer, à son modeste niveau, à
faire se lever le vent d’une ère nouvelle.
Aujourd’hui, confronté notamment à la
montée d’Internet et aux changements des
habitudes de lecture, Imagine entreprend
un chantier de rénovation. Le moment est
donc opportun pour nous faire part de vos
attentes, de vos besoins, mais aussi de
vos envies. Dites-nous aussi ce que vous
pourriez nous apporter. Car un projet de
presse comme Imagine vit d’abord grâce à
ses lecteurs, à ses abonnés surtout, qui lui
apportent le souffle nécessaire pour tenir
la distance, programmer des enquêtes, des
reportages approfondis et à contre-courant,
attirer des signatures, faire participer
des talents nouveaux…
Il nous arrive fréquemment de rencontrer
des lecteurs qui ne soupçonnent pas à
quel point leur soutien fidèle est important
dans la vie d’un magazine autonome et
déterminé dans ses idées comme Imagine.
Vous souhaitez que grandisse un projet
de presse comme le nôtre ? Alors soutenez-
nous en vous abonnant, faites-nous
connaître, ou offrez de temps à autre un
abonnement à Imagine, en cadeau par
exemple. Et puis, surtout, faites-nous part
de vos idées.
Et que la conviction qui nous habite que
nous faisons œuvre utile aide à former le
réseau le plus large possible, dont vous
êtes les indispensables maillons !
Merci !
André Ruwet
[1] La nature hors la loi, La Découverte, 1995.
[2] Dans une enquête publiée par le journal Le Soir en 1995 et coordonnée par le sociologue Benoît Scheuer, pour Survey and Action.
[3] Lire notre article en pages 40 et 41.
[4] « Les intérêts profonds de l’ego ne sont pas fondamentalement différents de l’intérêt de la planète », lire en pages 38 et 39.